Pour la population de la côte brésilienne, aller à la plage est une activité aussi routinière que se passer la soie dentaire. Et comment! Fil dentaire, c’est le nom qu’ils ont donné à leur emblématique petit bikini. Au Québec on a beau se passer le fil dentaire entre les dents, ça passe moins bien entre les fesses.

Serait-ce à cause du climat? L’environnement québécois n’est pas très propice à la baignade en mer, bien vu. Ses quatre mois de chaleur par année et son manque de plages ne permettent évidemment pas au Montréalais moyen de se pavaner allègrement en flips flops et en speedo…dommage! Tant qu’à passer cinq mois dans l’ombre de son chez-soi et perdre les trois autres à s’habiller et se déshabiller continuellement selon l’humeur de la pachamama, pourquoi ne se dévêtissent-ils pas un peu les fesses lorsqu’ils profitent des maigres plages qui leur sont accessibles?

Serait-ce à cause de la crainte d’objectivation? La chosification de la femme, et de l’homme, dans les télénovelas et les publicités trop sexistes, peut-être, mais pas sur la plage. Sur la plage, on s’aime et on est bien. La plage brésilienne c’est un endroit neutre, un no man’s land où tous sont égaux, où personne ne juge personne, où il n’y a ni classes sociales, ni partis politiques. La plage brésilienne c’est comme la Suisse, sauf qu’on ne voit pas beaucoup de fesses en Suisse. La plage brésilienne c’est ce qui manque au Québec, car le corps n’y est pas vu comme un objet, sinon plutôt comme un temple, dont on doit prendre soin et dont on ne doit surtout pas avoir honte.

Selon moi tout vient du manque flagrant de confiance que les Nord-Américains ont envers leur physique. Après avoir passé six mois à côtoyer les beach bums brésiliens, je peux affirmer que la Brésilienne moyenne est cent fois plus à l’aise dans son corps que la Québécoise. Et il en va de même pour les hommes! Tangas, speedos, moules-bites pour les Français, banana hammocks, slips de bain en voulez-vous en voilà! Parce que là bas, le speedo n’est pas synonyme d’homosexualité comme trop souvent ici, mais bien d’assurance, sans complexes! Ils sont peut-être (surement) moins coincés que nous.

Quant au culte balnéaire du corps brésilien, il est synonyme de fierté. De fierté et de confiance. D’amour pour sa propre anatomie. Les Brésiliennes sont belles parce qu’elles aiment leur corps, et ça se voit. Toutes les femmes de toutes les formes, de tous les âges et de toutes les largeurs se prélassent sur le sable dans un petit bikini. Tous les hommes, de toutes les formes, de tous les âges et de tous les ventres coquettent en petit maillot ajusté. Et il en va de même pour certains Européens et quelques Asiatiques.

Seuls les gringos nord-américains détonnent, avec leur maillot une pièce et leur long short, un peu embêtés de devoir les rouler sur le haut des cuisses quand il faut faire bronzette. C’est très correct, mais c’est tout de même moins agréable. Et les quelques aventuriers qui osent le porter ce petit maillot le remballent malheureusement aussitôt rentrés de vacances. C’est décevant pour leur estime de soi et surtout pour leurs fesses.

Mon conseil: portez-le ce fil dentaire si vous en avez en envie! Arborez-le ce moule-bite avec fierté! Non seulement votre bronzage vous en sera reconnaissant de minimiser les démarcations, mais vous vous sentirez plus libre, plus à l’aise et surtout plus léger, de corps et d’esprit, en toute modestie. S’il n’en tenait qu’à moi, toutes les femmes, faute de pouvoir voyager au Brésil, devraient tenter l’expérience et porter au moins une fois dans leur vie un itsy bitsy teenie weenie petit bikini, loin des critiques, très loin des complexes. Et pas nécessaire qu’il soit rouge et jaune à p’tits pois.

bikini body