Il y a vraisemblablement deux genres de textos. Ceux que l’on utilise pour passer une information rapide qui ne nécessite généralement pas de réponse complexe, allant du « Voilà l’adresse » au « Je suis arrivée » en passant par le tristement célèbre « Je dors ». Ceux-là justifient pleinement l’existence de la messagerie texte.

Puis, il y a les textos qui prennent racines dans les relations que l’on a et qui se faufilent tant bien que mal (mais plus mal que bien) dans les relations que l’on aimerait avoir.

J’ai été abasourdie devant mon amie tourmentée par les textos ou plutôt l’absence de textos d’un potentiel beau gosse, qui ne lui donnait plus signe de vie. « Pourquoi ne l’appellerais-tu pas pour voir? »

Peur, horreur et damnation de sa part, à mon grand chagrin. Depuis quand est-ce devenu un luxe que de parler à quelqu’un? Un luxe que l’on accorde exclusivement à l’élite qui gravite étroitement autour de nous? Amis très proches, parents, et même là…

Nous avons tous des questions, des craintes et des plans qu’il vaut mieux exprimer de vive voix, sans trop de filtres. Parce qu’on l’a tous déjà vécu, l’abus de message finit par masquer nos réelles attentes et causer des malentendus parfois cocasses, souvent vilains.

Toujours le moins possible

Le texto permet à l’expéditeur de peser chaque mot, de prendre plus de temps que nécessaire, et d’écrire le moins de lettres possible. Le message, devenu aussi insignifiant et fade que de la laitue non assaisonnée en a perdu tout son sens. Le « J’avais envie de prendre de tes nouvelles parce que ça fait longtemps que je ne t’ai pas parlé et tu me manques » devient généralement « Salut, ça va? » Un message aussi insipide qu’exaspérant.

Le destinataire quant à lui n’est pas encouragé à répondre. Il est probablement trop occupé à jouer à un jeu mesquin tel le  » Ça fait 10 minutes qu’on se parle non-stop en textos, mais maintenant je dois attendre 34 minutes avant de répondre pour ne pas paraître trop disponible ». Et s’il le fait, il ne le fera qu’avec un « Oui, et toi? » encore plus terne et froid, qui masquera son véritable souhait de vous faire part de son désir envers vous ou de ses angoisses du moment. L’expéditeur en sera surement encore plus troublé. Ayant mal à son ego, il décidera de ne plus jamais entamer la conversation, de peur de se faire rejeter de nouveau par une réponse décolorée ou pire, une simple, mais brutale non-réponse.

Du fait de la taille possible des phrases, du temps qu’ils prennent pour être écrits et des qualités rédactionnelles limitées de ceux qui les écrivent, les mots d’un texto paraissent, et souvent sont, incolores et vides de personnalité. Il est ainsi beaucoup plus difficile de savoir ce que la personne pense vraiment.

L’appel, par contre, rend possible le discernement de trémolos dans la voix, de l’importance que l’on porte à ce que vous dites ou de la présence d’un autre individu. Cela rapproche 1000 fois plus les deux interlocuteurs l’un de l’autre et fait passer par le fait même leur conversation à un niveau supérieur. Le « Salut, ça va? », small talk inévitable des conversations téléphoniques, devient ainsi en 10 secondes un tremplin conversationnel menant vers un horizon davantage intéressant que celui des textos vagues sans reliefs qui déforment la réalité.

Vous voyez-vous, face à face avec votre flamme, attendre 34 minutes avant de lui répondre? Malaise. Alors pourquoi le ferait-on à travers un écrit instantané supposé nous rapprocher de ceux qui sont loin? Pourquoi mettre l’appel sur un piédestal presque inatteignable qui ne fait que retarder inutilement le moment où l’on devra se dévoiler entièrement?

« Je ne veux pas utiliser mes minutes ». Sacrifier ses relations au dépend de l’argent ne devrait pas être une option. Et si un cellulaire ne sert pas exactement à ça, je ne sais pas à quoi il sert.

Non, mais allô, quoi!

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