Je juge les autres. Dans l’autobus, dans la rue, à l’épicerie. Je juge le sujet de leur conversation, la façon dont ils se tiennent ou ce qui se trouve dans leur panier. Je juge le gars qui vient me parler dans un bar tout comme je juge la femme qui traverse en plein milieu de la rue avec deux enfants dans les bras. J’ai déjà jugé un livre à sa couverture. Je juge, et tout le monde le fait un petit peu aussi. 

Le jugement a une connotation négative de par son utilisation. Il faut accepter ce que l’on ne comprend pas, sans passer de commentaires négatifs ou de critiques personnelles, puisque juger c’est mal. De facto, l’ouverture d’esprit et la curiosité l’emportent presque à chaque fois sur le jugement. 

Pourtant, porter un jugement sur quelqu’un n’est qu’un simple système d’évaluation. Elle, je la feel. Lui? Je le feel pas du tout. Il est notre premier dispositif d’avertissement. Il nous met en garde. Danger! Car après tout, la première impression qu’on se fait est souvent la bonne. C’est instinctif.

Ne dit-on pas d’ailleurs qu’il faut suivre son instinct? 

L’instinct de survie en forêt est selon moi le même instinct de survie que celui face à un gars un peu too much qui essaie flirter. Le jugement intérieur que je lui porte détecte une personnalité intrusive non compatible à la mienne. Il y a de ces fois où ça ne vaut pas la peine de perdre son temps à essayer quelque chose dont on sent déjà l’impossibilité, quelque chose avec laquelle on est pas à l’aise dès le départ. 

Mais tout ça n’a rien avoir avec un manque de confiance en soi, monsieur le psychologue. Car à ceux qui pensent que celui qui juge beaucoup les autres se juge lui-même durement, je réponds qu’avoir des standards, pour les autres et pour soi-même, n’a jamais été une mauvaise chose en soi. Tant que ces standards ne frôlent pas bêtement la xénophobie! Il faut faire preuve de discernement, surtout de nos jours.  

Bien sûr tout est relatif comme le dirait Albert, même la première impression. Le gars en question aurait pu être très nerveux, la mère aurait pu être vraiment pressée, la fille en talons hauts au Provigo aurait pu être en route vers un gala et aurait oublié d’acheter du papier de toilette. Qui sait? Peut-être Judy, mais surement pas moi. 

Il arrive que je sois agréablement surprise par le tournant d’une rencontre. Apprendre à connaitre quelqu’un malgré les avertissements peut occasionnellement aboutir à une relation intéressante et très enrichissante. Je me surprends à apprécier la personne en question, bien qu’elle ne me disait rien qu’y vaille de prime abord. Et pire, je finis par mettre en veilleuse mon mécanisme interne de jugement…Jusqu’à ce qu’une autre rencontre donne raison à mon instinct. Je le savais

S’il est clair dès le départ qu’une personne, qu’un job ou même qu’une ville n’est pas pour vous… Est-ce que ça vaut la peine d’essayer?